Des chercheurs d’Agroscope ont déchiffré un génome bactérien particulièrement difficile à «craquer» et dévoilé la complexité de l’information génétique de près de 10’000 bactéries. Cette découverte permet notamment d’explorer les mécanismes d’action de microorganismes et d’inhiber ainsi certains agents pathogènes des plantes.
Déchiffrer le patrimoine génétique de bactéries est une étape importante pour comprendre quelles fonctions diverses peuvent exercer ces microorganismes. Il s’agit par exemple de déterminer à quel antibiotique une bactérie particulière est résistante, ou encore quels facteurs peuvent contribuer à la lutte contre un agent pathogène des plantes. Ces informations qui revêtent une grande importance pour Agroscope sont analysées dans le cadre du programme de recherche Biodiversité microbienne (MicBioDiv).
L’équipe de Christian Ahrens, bioinformaticien à Agroscope et membre du Swiss Institute of Bioinformatics, est parvenue à dévoiler la complexité insoupçonnée de génomes bactériens. Cette avancée permet aux chercheurs de définir quelle est la meilleure stratégie pour décoder entièrement le génome de bactéries, même lorsque leur patrimoine génétique est très complexe. Lors du décodage de la bactérie Pseudomonas koreensis, les répétitions de séquences presque identiques (repeats) ont très longtemps compliqué le déchiffrage complet du génome. Finalement, l’équipe d’Agroscope a réussi à identifier le patrimoine génétique complet de la bactérie au moyen de très longues séquences, générées dans nos laboratoires grâce à la nouvelle technologie Oxford Nanopore. Contrairement à l’opinion répandue que de telles séquences répétitives ne joueraient pas un rôle significatif ou qu’elles ne contiendraient pas de gènes importants, les chercheurs ont trouvé dans ce cas de nombreuses copies de gènes qui procuraient à la bactérie un avantage pour sa survie à la surface des plantes.
Les chercheurs ont en outre rendu accessibles les analyses du patrimoine génétique de près de 10’000 bactéries. Celles-ci ont montré qu’environ 3 % de tous les génomes bactériens étaient très complexes. La technologie de séquençage utilisée a permis de comprendre que quelques-uns de ces génomes n’avaient pas été complètement déchiffrés et qu’ils comportaient encore des erreurs.
Grâce à cette approche, différents microorganismes isolés dans les microbiomes du compost sont actuellement l’objet d’un séquençage complet, effectué en collaboration avec le FiBL. Les chercheurs ambitionnent par la suite d’étudier les mécanismes d’action permettant aux microorganismes d’inhiber les agents pathogènes responsables des maladies des plantes. Ce projet et la collaboration avec le groupe de recherche Phytopathologie d’Agroscope représentent également une importante contribution au Plan d’action national de protection des plantes.
À l’heure actuelle, nous affinons encore l’analyse afin de renforcer le portfolio méthodologique de l’équipe dans ce domaine de recherche porteur d’avenir qu’est la «génomique fonctionnelle». Cela permettra de transférer davantage d’acquis de la recherche fondamentale vers la pratique, comme par exemple une utilisation plus ciblée des microbiomes.