En 2014, dans le cadre d’un projet de recherche qui a eu un grand retentissement, Agroscope a pu montrer à quel point les organismes du sol étaient importants pour une production végétale efficiente. Dans cette expérience, des plantes ont été cultivées sur des sols qui contenaient des organismes en quantités et compositions différentes. Dans les procédés présentant une vie du sol réduite artificiellement, le rendement des cultures était nettement plus faible. Parallèlement, les pertes d’azote par lessivage augmentaient. Pour mieux comprendre ces mécanismes, Agroscope étudie, dans des essais sur le terrain, quelles mesures d’exploitation influencent la vie dans le sol et établit des recommandations pour une production végétale basée sur une utilisation rationnelle des ressources.
Il faut cependant savoir que la ressource naturelle qu’est le sol, habitat d’une multitude d’organismes, est menacée à la fois sur le plan quantitatif et sur le plan qualitatif. D’une part, des sols fertiles depuis des siècles disparaissent chaque seconde à cause de l’urbanisation. D’autre part, des erreurs d’exploitation peuvent entraîner la perte de matière organique, l’érosion ou le compactage des sols. Lorsque de lourdes machines agricoles circulent sur les sols humides, l’eau stagne en surface et l’oxygène fait défaut. Grâce à un nouveau type de sonde, Agroscope étudie à quel moment l’état de la structure du sol devient critique par manque d’oxygène pour les racines et les organismes qui y vivent. Les chercheurs analysent également comment une structure défavorable du sol agit sur la disponibilité et la mobilité des éléments nutritifs et des polluants. Ce type de résultats est intégré au projet Terranimo, une aide à la décision développée par Agroscope, la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires (HAFL) et des partenaires européens pour aider les agricultrices et agriculteurs à éviter le compactage des sols.
Priorité à la qualité du sol
Dans le cadre de l’Observatoire national des sols (NABO), Agroscope a été mandatée par les offices fédéraux de l’environnement (OFEV) et de l’agriculture (OFAG) pour mesurer différentes propriétés pédologiques, ainsi que la contamination des sols par les métaux lourds et une série de polluants organiques sélectionnés. Les mesures ont lieu à intervalles réguliers sur une centaine de sites environ. Depuis 2012, dans le cadre du monitoring NABObio, des paramètres microbiologiques sont également relevés sur trente de ces sites. A partir d’échantillons composés prélevés sur des surfaces d’observation de cent mètres carrés, les chercheuses et chercheurs déterminent ainsi la biomasse microbienne, la respiration basale et la quantité de substance héréditaire des microorganismes du sol. Dans les années 2012 à 2014 par exemple, la biomasse microbienne et l’activité étaient, comme on pouvait s’y attendre, plus importantes dans les prairies que dans les sols cultivés.
Les organismes du sol peuvent servir d’indicateurs car ils peuvent donner très tôt des indications sur des changements néfastes de leur habitat. Le projet NABObio utilise les méthodes récentes d’analyse de génétique moléculaire qui permettent depuis peu d’étudier la diversité des microorganismes et leurs fonctions. Le programme de recherche «Biodiversité microbienne», lancé par Agroscope en 2014, étudie la totalité des microorganismes et les fonctions de leurs principaux représentants dans les végétaux, les produits laitiers fermentés et les sols. Dans ce contexte, la biodiversité microbienne est étudiée dans différents sols et systèmes représentatifs de la Suisse et de son agriculture, afin de mieux comprendre l’interaction entre le type de sol, son utilisation et les microorganismes qui y vivent. Ces informations contribueront à une évaluation plus approfondie de la qualité du sol.
Exploitation durable
Agroscope développe des mesures pour régénérer les sols endommagés. Pour ce faire, elle étudie le gonflement et le retrait naturels des sols compactés, mais aussi comment les pores peuvent se reformer à l’aide des racines et des vers de terre. L’important pour la qualité d’un sol agricole est non seulement sa structure intacte, mais aussi sa teneur en matière organique. En 2014 à l’aide d’une nouvelle méthode, Agroscope a calculé le bilan de matière organique de différents types d’exploitation dans toute la Suisse et a ainsi fourni des éléments sur la durabilité de l’utilisation des sols. Les sols étant approvisionnés par les résidus de racines et les restes de récolte au champ ou par les engrais organiques recyclés comme les engrais de ferme et le compost, les organismes qui y vivent sont alimentés et la structure du sol gagne en qualité. Ces résultats sont confirmés par les évaluations des mesures de l’essai DOK longue durée, dans lequel des systèmes de production intégrés et biologiques sont comparés depuis plus de trente ans. Les engrais verts combinés à des systèmes de culture sans labour, tels qu’ils sont développés et testés par Agroscope pour les grandes cultures sur la base d’une utilisation rationnelle des ressources, apportent des avantages similaires pour le sol.
Agroscope développe non seulement de nouvelles connaissances, mais s’efforce également de les transférer dans la pratique. En 2014, les collaborateurs d’Agroscope ont participé à de nombreuses journées sur le terrain et à des journées d’informations organisées par des institutions cantonales, à des fins de formation ainsi que de conseil politique. Ces manifestations ont permis d’expliquer l’importance des processus de la vie du sol et comment les utiliser pour une production agricole durable.